Et oui pourquoi ?!
D’abord définissons l’anonymat avec ces deux nuances :
- Etre anonyme c’est d’abord ne pas donner son nom. Son vrai nom, et prénom, et tout ce qui peut permettre de nous identifier clairement et distinctement.
- Mais c’est aussi utiliser un pseudonyme. Un autre nom. Un nom pour le fun. Avec derrière l’idée de conserver malgré tout une identité, ou disons d’être reconnaissable par certaines personnes. Non pas qu’elles connaitraient notre vrai nom mais plutôt qu’elles reconnaitraient notre pseudonyme.
Pourquoi cet article sur l’anonymat ?
Parce qu’il me semble que l’anonymat doit être défendu.
Défendu parce qu’on l’attaque. Défendu parce qu’on lui attribue à tort, bien plus qu’à raison, des effets. Défendu parce qu’on omet volontairement, ou en méconnait, les apports, et plus particulièrement sur internet.
Qui fait des reproches à l’anonymat sur Internet ?
Avant de voir ce qui est reproché intéressons-nous à ceux qui les font, ces reproches.
- La plupart (?) de nos politiques qui aimeraient bien pouvoir épingler n’importe qui pour un message, ou lui tailler un costard en lui rappelant un autre message d’il y a 10 ans quand bien même ce message ne serait plus en accord avec la pensée actuelle du concerné (mais ça ils s’en moquent).
- Les géants actuels des réseaux sociaux, Facebook et Google+ en tête, dont les dirigeants n’ont que faire de l’anonymat et vont donc lui trouver de bonnes raisons de ne plus être. Sans doute pour des raisons de monétisations des informations que leurs gentils clie… utilisateurs leur offrent.
Que reproche-t-on à l’anonymat ? Que pense-t-on que la « dés-anonymisation » puisse apporter ?
Pour faire passer l’idée que l’anonymat c’est le mal et que ça mange des petits chatons trop mignons au p’titdej voici les principales raisons qu’on (nous) donne :
- Les gens se comportent mieux quand ils sont reconnaissables. Donc quand ils sont anonymes ils seraient forcément intenables, grossiers, orduriers, etc etc.
- Les gens assument mieux leurs idées quand ils sont reconnaissables. Donc quand ils sont anonymes ils seraient forcément irresponsables et n’assument rien de ce qu’ils disent.
- Les gens n’auraient plus l’impression de pouvoir dire tout ce qu’ils ont en tête s’ils n’étaient pas anonymes (ici on présuppose les « mauvaises » choses, à définir par ailleurs). On veut surement les aider à « penser bien//bien penser »… du moment qu’ils se taisent.
- La fin de l’anonymat c’est pour « civiliser » l’Internet. Civiliser, rien de plus. Personnellement quand on emploi ce mot ça m’inquiète plus qu’autre chose. Par le passé, l’Histoire, beaucoup de nos ancêtres (en tant qu’Homme) ont voulu civiliser les autres. On connait le résultat (sinon refaite de l’Histoire).
- On suppose même (!) que ça améliorerait la qualité des débats, que l’argumentation s’en trouverait améliorée. Vous avez l’impression que les débats sont correctement menés quand vous regardez les débats à l’Assemblée Nationale vous ? Ils se connaissent tous et ça ne les empêche pas de n’être parfois rien de plus que de vieux enfants de maternelles manquant tous plus de respect aux uns qu’aux autres.
Qu’est ce que l’anonymat apporte ?
- Les gens peuvent aller au fond d’une idée, d’une pensée sans se la voir reprocher au quotidien et à l’avenir.
- Ce qui amène irrémédiablement de l’honnêteté, puisqu’ils peuvent dire ce qu’ils pensent vraiment.
- S’ensuit une bien meilleure complétion du sujet abordé puisque tous les éléments peuvent être débattus.
- Et puis, tout simplement, ça permet à un débat d’exister ! Car le fait de ne plus être bridé est libérateur. Surtout sur des sujets sensibles.
- Enfin, c’est un cercle qui peut être vertueux puisqu’on arrête de survoler les sujets pour ne choquer personne ni froisser sa propre image (qu’on devra trimbaler les jours suivants).
Il faut prendre en compte que ‘beaucoup’ de gens n’ont pas envie de participer à des débats de peur qu’on leur reproche ce qu’ils vont dire. Ceux qui participent le font souvent de manière édulcorée. Enfin, très peu vont à fond dans leur pensée et il n’est pas certain que ça les aide au quotidien.
En quoi le fait de ne plus être anonyme peut aider plus de gens à participer à des débats, à des témoignages ?
Le spectre d’une opinion passée ou présente qu’on nous rappellerait mesquinement au moindre accroc avec quelqu’un (un collègue, un supérieur hiérarchique, une autorité administrative ?) est-il vraiment motivant ? Je ne le pense pas. C’est tout le contraire même. Il n’y a que si vous voulez museler quelqu’un, lui pourrir la vie, ou lui être extrêmement désagréable que c’est ce qu’il faut faire.
Quid du droit à l’oubli dans tout ça ? Et mon identité numérique, je la gère comment ?
- Aaah le fameux « droit à l’oubli ». C’est à dire, pour schématiser brutalement, le droit qu’on nous foute la paix avec un message écrit dans notre adolescence ou x années avant, qui n’a sans doute plus aucune valeur et rapport avec l’individu que nous pouvons être aujourd’hui.
- Ce droit à l’oubli va de pair avec la « gestion de l’identité numérique« . Comment gérer convenablement son identité numérique si l’anonymat n’est plus ? Comment peut-on faire ça proprement alors que des moteurs de recherches auront (ont) pour but d’indexer le maximum d’informations sur tel ou tel individu ? Comment est-ce seulement imaginable quand des services qui veulent se faire passer pour indispensables (et réussissent plutôt bien quand on regarde les réseaux sociaux) sauront tout de vous sur des années et qu’ils ne vous permettront pas de gérer quoique ce soit car ils en ont fait leur gagne-pain ?
C’est pour toutes ces raisons que je pense sincèrement que l’anonymat doit persister, qu’il doit être compris, et que nos sociétés doivent le respecter.
Au passage, je ne sais pas vous mais moi j’ai bien rigolé (un peu jaune) quand à l’époque on a essayé de nous faire passer en force le « fichier Edvige » et qu’en fait, en proposant un service tout con comme Facebook, les gens se sont fichés et affichés tout seuls… ! Comme quoi, bien souvent pour obtenir quelque chose il faut soigner l’art et la manière, même si c’est quelque chose de douteux qui en offusquerait plus d’un si c’était fait autrement. GG Facebook et autres réseaux sociaux.
Enfin, en ces temps de répression de la contestation (genre, au hasard, en Syrie), peut-on vraiment argumenter contre l’anonymat ? Voyez ce qui arrive aux civils, qu’ils protestent ou non. Imaginez maintenant ce qui arrive à ceux qui protestent ouvertement sans prendre le soin de masquer leur identité… Pas jojo hein ? Même pas besoin de mots pour que tout le monde comprenne, tellement c’est évident. Et la communauté internationale « s’en fout », dans le sens qu’elle va pas lever le petit doigt pour ne pas froisser X ou Y puissances du coin qui est allié à un régime du genre. A part avec de belles phrases du genre « Nous réprouvons solennellement ce qui se passe ici ou ailleurs, mais comme on a pas de couilles on fera rien sinon ça va partir en 3ème guerre mondiale. ». Notons que si c’était dit comme ça, ça serait un argument relativement valable.
Bref, bienvenue dans la réalité où assumer des idées à visage découvert c’est risquer de ne plus avoir de visage à découvrir.
Une idée évolue, celui qui l’énonce aussi !
Pour terminer je tiens à souligner que chacune de nos pensées, de nos idées, de nos réflexions, de nos commentaires, et en bref toutes nos traces quelles qu’elles soient, ne représentent assurément (et encore) l’avis de leur auteur qu’au moment où ce dernier en fait part.
Nul ne dit qu’un jour, un an, dix ans après l’auteur soit encore d’accord avec lui-même ! Avant de lui sauter à la gorge il serait de bon ton de vérifier qu’il est encore sur sa propre longueur d’onde passée. ^^
Les idées évoluent. N’oubliez pas que leurs auteurs aussi.
Source de l’image : http://ohax.fr/faut-il-sauver-la-demeure-du-chaos
Lors d’un débat,
est-il plus important de retenir le message, l’évolution de la discution ou bien le nom de celui qui a parlé ? Marquer son nom dans l’Histoire falte certainement notre égo, mais le besoin de reconnaissance, n’étant pas vital, n’est qu’un désir. Un désir risqué par les temps qui courent, comme tu l’a si bien expliqué.
Si c’est le débat qui importe, alors le nom ne sert que de cible aux combattant de la liberté d’expression et du processus d’évolution intellectuel.
Cela dit, respect aussi a celui qui assume ses pensée en son nom, jusqu’au bout, quitte a mourir. Mourir pour des idées peut etre efficace. Encore que, des nos jours il serait facile de faire passer le sage pour fou avec quelques images hors contexte….
Gloire a l’anonymat.
Tout à fait d’accord avec toi sur ces points.
A part pour se flatter soi-même ou être flatté de l’attention que nous portent les autres pour ce qu’on ose dire, je trouve que c’est surtout très risqué pour pas grand chose de plus que de la reconnaissance et une prise de melon sous hormones de croissance.
Je pense aussi que l’on a trop tendance à vouloir résumer quelque chose, une idée, à quelqu’un.
D’où le fait qu’on nomme des idées et des courants d’idées à partir du nom d’un gus… au lieu de prendre l’idée ou un élément marquant pour la nommer ! (Le Marx-isme, le Toyot-isme, le Ford-isme, le Keynésian-isme, etc).
Du coup, parfois, certains vont se concentrer sur la démolition de l’homme (ou de la femme) derrière l’idée plutôt que sur les idées…